Le Port autonome d’Abidjan a organisé une visite, ce mardi 7 janvier 2025, sur le navire Zimrida, chargé de nitrate d’ammonium et objet de polémiques depuis quelque temps. A l’occasion, le directeur général Hien Sié s’est exprimé face à la presse pour donner des explications sur la situation véritable du bateau. Il s’en est suivi également des questions-réponses. Nous vous proposons son échange avec les médias.
« Je suis ici avec le représentant de l’administration, de l’affaire maritime, du ministère des Transports, de l’ONPC, des Douanes et d’autres administrations ivoiriennes compétentes en matière de gestion de ces marchandises. Pour commencer, comme prévu, hier, après la réunion technique de tous les acteurs étatiques et du secteur privé relative à la gestion de la cargaison de nitrate d’ammonium qui devait passer par le port pour un client ivoirien, nous venons d’effectuer une visite sur le navire transportant la cargaison. Vous avez pu, avec vos caméras, vous rendre compte du contenu de ce navire-là. Le navire qui est derrière nous, c’est le Zimrida, un navire vraquier. Si vous avez vu ce navire dans le port, sachez que, comme tout navire entrant dans le port, ce navire a fait l’objet d’un contrôle par la DGCAM, qui est la Direction Générale de l’Affaire Maritime et Portuaire. Aucun navire ne peut accéder au port d’Abidjan et dans les ports ivoiriens sans un contrôle de la DGCAM, qui prend en même temps le temps de vérifier si ce navire est inscrit sur une liste noire. Donc, si le Zimrida est dans le port, sachez qu’il n’est pas sur une liste noire.
Deuxièmement, ce navire transporte du nitrate d’ammonium, un produit entrant pour les industries agricoles, notamment pour les engrais, et pour le secteur minier et routier, dans le cadre des explosifs utilisés pour faire le terrassement. Selon les chiffres de l’OMC, chaque année, 50 millions de tonnes de nitrate d’ammonium sont transportées par voie d’eau dans les différents ports du monde. Et le port d’Abidjan, depuis des années, reçoit régulièrement du nitrate d’ammonium pour l’émergence des industries locales. Par exemple, en 2024, nous avons reçu une trentaine de navires qui sont passés par le port d’Abidjan, pour un volume global de plus de40 000 tonnes. Cependant, le nitrate d’ammonium est un produit sensible et peut être dangereux dans certaines conditions.
Dans la classification des matières dangereuses par l’Organisation mondiale du commerce, la classification va de 1à 9. Le nitrate d’ammonium est classé à la classe 5-1. Évidemment, en termes de dangerosité, il est classé comme un produit moyennement dangereux, 1 étant le plus dangereux (notamment les explosifs et certaines armes). Donc, comme il est classé parmi les matières dangereuses, son importation, son transport et son stockage sont strictement réglementés. Ces réglementations sont dictées par les lois nationales et supranationales. Aussi, pour importer du nitrate d’ammonium, il faut d’abord que l’importateur présente des installations agréées par le service de l’État pour garantir que le nitrate d’ammonium puisse être stocké dans des conditions de sécurité. En second lieu, l’importateur doit obtenir un agrément des ministères techniques, notamment le ministère de la Défense et le ministère de l’Agriculture. Parfois, ces engrais sont utilisés comme explosifs, ce qui justifie un contrôle accru des installations.
Malgré l’agrément et la conformité des installations, chaque importation est soumise à une autorisation préalable. Que ce soit une tonne ou deux, chaque importation nécessite une autorisation. Dans le cas de la cargaison que vous voyez derrière vous, deux autorisations différentes ont été émises. Une première selon les besoins de l’opérateur, quia commandé un volume en deux étapes, ce qui justifie les deux autorisations. Au port, le nitrate d’ammonium, comme toutes les marchandises dangereuses, bénéficie d’un traitement particulier. Ce navire bénéficiera d’une veille sécuritaire 24 heures sur 24, de son arrivée à son départ. Vous avez vu qu’il y a un camion. Ce camion restera là jusqu’au départ du navire. Ce n’est pas la première fois, c’est la procédure habituelle.
Pour sortir ce matériau du port, le nitrate d’ammonium ne reste jamais dans le port. Lorsque le moment vient, le camion arrive, il est déjà garé, et les sacs sont directement chargés sur le camion. Celui-ci est escorté par les Douanes et le ministère de la Défense jusqu’au lieu de stockage. Ce processus s’appelle la sortie sous palan des matériaux dangereux. Ce n’est pas un cas particulier, c’est une procédure standard dans tous les ports. Je voudrais préciser que les installations agréées, les opérateurs agréés et les ports avec des conditions particulières pour le passage des marchandises dangereuses assurent la sécurité de ces opérations. Depuis des années, le nitrate d’ammonium passe par ce port sans incident, conformément à la réglementation. Le port d’Abidjan reçoit régulièrement des matières dangereuses comme le nitrate d’ammonium, les explosifs, et autres produits. Tous les ports du monde sont équipés pour gérer ces types de marchandises.
Je voudrais donc rassurer les populations ivoiriennes et l’opinion internationale que les ports ivoiriens fonctionnent selon les standards internationaux. Ils sont soumis à un dispositif réglementaire robuste mis en place par l’État pour protéger les populations et les biens. Les ministères techniques et les structures étatiques compétentes mettent en œuvre cette réglementation. La gestion de ce dossier en est un témoignage. Avant de vous quitter, je tiens à préciser que le port d’Abidjan est une société d’État, donc la propriété de tous les Ivoiriens. Autant je suis honoré d’en assurer la gestion quotidienne, autant je suis tenu à la transparence concernant les actes de gestion. À ce niveau, je tiens à dire à la presse que nos services sont disponibles pour toute personne intéressée à en savoir davantage, non seulement sur ce cas, mais aussi sur d’autres transports. Nos services sont là pour vous fournir les informations nécessaires.
L’exploitation portuaire est un domaine spécialisé, parfois tout le monde n’est pas censé tout savoir, mais chacun peut obtenir les éléments qu’il souhaite, le moment venu. Concernant la cargaison, si quelqu’un avait approché le port, je suis certain qu’il n’y aurait pas eu autant de questions. Je voudrais vous rassurer que le sports ivoiriens fonctionnent correctement selon les standards internationaux. Vous avez visité une partie du port qui date de 1969. La meilleure partie du port est le nouveau terminal, mais à votre demande, nous pouvons organiser une visite. Le port ivoirien fonctionne bien, et le port d’Abidjan, en particulier, est en plein essor. Si autrefois, le nitrate d’ammonium était principalement utilisé pour l’agro-industrie, ces dernières années, avec l’expansion de l’industrie minière, les découvertes de nouvelles mines augmentent, et ces mines utilisent beaucoup de nitrate d’ammonium. Pour vous donner une idée, en 2023, le port d’Abidjan a manipulé 20 000 tonnes de nitrate d’ammonium, et en 2024, ce volume a atteint 46 315 tonnes. Tant que l’industrie minière continuera à croître, le trafic de nitrate d’ammonium au port d’Abidjan augmentera, en fonction de l’ouverture de nouvelles mines et de la fermeture des anciennes. Je vous remercie de votre attention et de votre présence aujourd’hui ».
Questions-réponses
Combien de temps prendra le déchargement avant le départ du bateau ? La manutention est-elle prévue pour combien de temps ?
Le navire repartira puis reviendra après, ce n’est pas encore son tour. Comme à l’aviation, chaque navire arrive selon son programme. Il est entré juste pour des raisons de transparence. Il fera la file et reviendra lorsqu’il sera programmé. La manutention des 7 000 tonnes prendra environ une semaine. En une semaine, le bateau sera parti. Pendant ce temps, il y aura une surveillance 24heures sur 24, y compris un camion pompier à côté.
Savez-vous plus ou moins la date de commande des 7 000 tonnes ? Certaines personnes disent que c’est à cause de l’errance du bateau que la Côte d’Ivoire… ?
Non, ce n’est pas le cas. Un bateau ne prend pas la mer sans commande. L’opérateur local a commandé du nitrate d’ammonium en Russie, un des plus grands producteurs mondiaux. Le bateau transportait 20 000tonnes, ce qui implique plusieurs propriétaires de cargaison, dont l’opérateur local. Après des avaries du Rubi, la cargaison a été transférée sur le Zimrida, qui est enfin arrivé à Abidjan.
Que va-t-il advenir des 7 000 tonnes ?
Elles ont été commandées par un opérateur minier local. Elles seront sorties du port sous escorte et livrées à ses installations. Il s’agit d’un opérateur mondial travaillant dans les mines au Canada et dans une quarantaine de pays. Depuis 2012, cet opérateur importe régulièrement du nitrate d’ammonium. Merci à vous, et bonne année !